Réédition …Piège à son !

Du fait d'une malheureuse juxtaposition hétéroclite de paramètres musicaux défaillants, cette lecture de la merveilleuse Symphonie n° 6 dite Tragique de Gustav Mahler génère à son écoute une immense déception.

Comment George Szell (1897-1970) dont on connaît la fabuleuse carrière et l'Orchestre de Cleveland, phalange de premier plan, ont-ils pu collectionner autant de contresens ? Les intonations asthéniques, les attaques molles et les timbres mal définis défigurent ce chef-d'œuvre mahlérien composé au cours des années 1903-1905, créé à Essen en 1906 sous la baguette du compositeur et dont les Etats-Unis purent découvrir la valeur à New York en 1946, grâce à Dimitri Mitropoulos. Il existe tant d'excellents enregistrements de cette symphonie, que l'on s'interroge sérieusement sur l'opportunité d'une telle réédition. Pourtant, l'enregistrement ne date que de 1967 et a été capté en public dans des conditions apparemment acceptables. Mais sa restauration semble bien avoir dégradé la situation plutôt que de l'avoir embellie.

Toujours est-il que l'Orchestre de Cleveland paraît excessivement lointain, monolithique, neutre, avec des pupitres fondus et sans relief. Qu'on en juge, par exemple, par l'émission morne et somnolente des cuivres dans les passages où, au contraire, ils devraient briller et porter l'œuvre à des sommets d'intensité sonore et émotionnelle. Quelle déception ! Il nous faudra donc sans tarder oublier cette sous-performance et en revenir, pour se délecter sans arrière-pensée, aux meilleurs interprètes de ce chef-d'œuvre incontestable, tous marqués par une unité de pensée, de conception et de réalisation (Solti, Abbado, Bernstein, Boulez …)