Le sacre de Christian Lindberg

Ce disque est un bel hommage au statut actuel du tromboniste virtuose Christian Lindberg.

En une dizaine d'années ce musicien s'est imposé, en terme d'élargissement de répertoire, comme le « Rostropovitch » de son instrument. En effet, notre homme est à l'origine de 80 créations de concertos pour trombone et orchestre ! Les plus grands compositeurs actuels sont désormais représentés dans la littérature soliste du trombone : Takemitsu, Lindberg, Pärt, Nyman, Berio, Xenakis, Turnage… Repoussant les limites de la virtuosité, Lindberg exploite aussi les plus incroyables possibilités à l'image du désormais célèbre Motorbike concerto de Jan Sandström qui mêle instruments et sons de moteur ! Le soliste s'impose comme l'un des musiciens actuels les plus importants et un récent sondage initié par la légendaire manufacture Conn-Selmer auprès de ses clients, positionne Lindberg au onzième rang parmi 1800 musiciens. Classé premier musicien classique, il est juste précédé par Louis Amstrong et il devance Benny Goodman ! Excusez du peu !

Ce présent disque regroupe trois partitions commandées par le tromboniste à des compositeurs majeurs de notre époque. Dans une intéressante notice de présentation, le musicien nous explique la genèse de ces pièces. Fruit du rêve d'un jeune musicien qui ambitionnait de jouer un concerto de Xenakis, Troorkh fut créé en 1993. Redoutablement difficile dans ses successions de certaines notes, ce concerto nécessita deux ans de préparation au musicien, uniquement pour adapter ses lèvres aux redoutables traits. Le résultat est absolument phénoménal, et l'on retrouve tous les sortilèges du talent de Xenakis : une musique granitique et éruptive, ainsi qu'un sens inné des alliages instrumentaux. Composé à l'initiative du BBC Symphony à l'occasion de ses 70 ans, Yet Another Set To marque une transition radicale, mais toute aussi talentueuse vers le vocabulaire impulsif et ultra virtuose du compositeur anglais. Ce premier enregistrement de la nouvelle version de la pièce, porté par un soliste des plus enthousiastes, arrache tout dans un geste chorégraphique hautement déhanché. Dernière pièce de ce copieux programme, Solo (1999) de Berio propose un intéressant travail sur les timbres. Sans démériter, cette pièce est un peu en retrait après le double choc Xenakis-Turnage.

Pour accompagner Lindberg, le label BIS a mis les petits plats dans les grands en lui offrant le philharmonique d'Oslo sous la direction de Peter Rundel, l'un des chefs les plus affûtés dans ces musiques. Un déferlement d'enthousiasme traverse ce disque absolument magistral servi par une prise de son 100% BIS, c'est-à-dire : précise, riche et colorée. On en redemande !