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Mes aïeux, quelle époque !

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Toulouse. Chapelle Sainte-Anne. 24. IV. 2007. Motets et cantates de Dietrich Buxtehude (1637-1707), Georg Böhm (1661-1697), Nikolaus Bruhns (1665-1697), Lovies Busbetzky( ?- ?) ; Gilles Cantagrel (présentation) ; Anne Magouët, soprano ; Jean-Louis Comoretto, alto ; Sebastien Obrecht, ténor ; Stephan Imboden, basse ; Flavio Losco, Nirina Bougés, violons ; Jennifer Lutter, alto ; Etienne Mangot, viole de gambe ; Jean-Paul Talvard, violone ; Yasuko Bouvard, orgue ; direction : Jean-Marc Andrieu.

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Orchestre Baroque de Montauban – les Passions

Le concert de cette soirée, donné par et l'orchestre les Passions, à la chapelle Sainte-Anne, était le dernier de la saison. Présenté par , ce fut un extraordinaire voyage dans le temps et dans le Nord de l'Allemagne. , avec sa voix et son style vivant inimitable, sa connaissance encyclopédique, a su montrer qu'un grand marché européen de la musique y était né avant l'heure, et parcourir ce pays avec de tels guides a été un moment de grand bonheur. Bien que cette région de l'Europe ne soit certainement pas la plus clémente, la qualité des œuvres écrites à la fin du XVIIe siècle est si confondante, que le public s'est même pris à envier les contemporains de ces merveilleux musiciens !

Heureux temps ! Heureux peuple ! La musique y était considérée comme l'art suprême de la communication. Les échanges entre musiciens étaient féconds, respectueux et enrichissants. Le public, connaisseur et exigeant, réclamait ce qui se faisait de mieux, et les compositeurs connaissaient ce qui se composait en France, en Italie, en Angleterre. De fait, sans qu'il s'agisse de copie, on en ressent l'influence subtile dans chaque pièce. Toutes ont pourtant en commun une densité toute germanique.

Commémorant le tricentenaire de la mort du grand Buxtehude, et afin de rendre hommage à son génie de compositeur et de maître, le choix du programme comprenait, entremêlées à ses œuvres, certaines pages de ses contemporains et élèves. La première cantate BuxWV 40 nous a, d'emblée, convaincus de la hauteur de l'inspiration du musicien ; cette musique est belle, ouverte sur toutes sortes de styles, extrêmement variée et laisse une impression de puissance maîtrisée, une force calme qui avance, sûre d'elle-même. L'interprétation est magistrale, pleine de vie et d'émotion. Le public est immédiatement saisi, conquis et heureux. Cette impression si agréable ne le quittera plus de toute la soirée.

La deuxième œuvre est d'un certain Lovies Busbetzky, dont ne sont connues ni la date de naissance ni même de la mort. On sait qu'il est né en Lituanie et fut l'élève de Buxtehude aux environs de 1685. Son nom même est absent des dictionnaires… Sa cantate Erbarm dich mein, o Herre Gott est un dialogue entre l'âme et Jésus, représentés traditionnellement par une soprano et une basse. Cette œuvre particulièrement touchante est construite sur une écriture très lisible. L'âme chante en longues notes éplorées, tandis que le Christ porteur d'un message d'espoir, en ses valeurs courtes et ses vocalises, semble parfois danser. Les interprètes, très engagés, portent avec ardeur ce message d'espérance. Vocalement la tessiture semble toutefois éprouver quelque difficulté dans les graves, autant la soprano que la basse.

Lui succède la cantate BuxWV 103, dans laquelle les interprètes observent de très belles nuances et impriment un extraordinaire élan. La direction ample de fait merveille. La communion entre les chanteurs, les instrumentistes et le chef est très réjouissante, avec de beaux moments de complicité émue.

est un contemporain de Buxtehude, également très célèbre. Tous deux furent les maîtres de Jean-Sébastien Bach. Sa cantate Mein Freund ist mein, éloge de l'amitié, présente des moments de recueillement rares alternant avec des passages en tutti très brillants. La science de rythmes très complexes impressionne. Certains airs, soutenus par la seule basse continue, sont si recueillis que ne dirige plus. Moments magiques, comme suspendus ! C'est l'œuvre qui offre aux solistes masculins les airs les plus développés. Ils sont tous à la hauteur des exigences, mais le ténor mérite une mention particulière. Sa voix très bien placée se projette sans limitations. Elève du grand Howard Crook, il semble avoir en germe certaines de ses extraordinaires qualités. Il a d'ores et déjà une belle présence et son autorité le prédispose certainement à devenir un talentueux évangéliste des Passions de Bach.

Pour achever ce voyage fabuleux, la cantate Die Zeit meines Abschieds ist vorhanden (voici le temps de mes adieux), est porteuse d'un grande émotion, car son auteur, Nicolaus Bruhns, aurait pu devenir le fils spirituel de Buxtehude si la mort ne l'avait emporté à l'âge de 26 ans. Quelle force et quelle inspiration émanent de cette œuvre ! Les tutti sont brillants comme en Italie, tandis que l'utilisation du contrepoint évoque « l'air du froid » du King Arthur de Purcell. Bruhns se révèle tout à la fois sensible à la musique du monde et conscient de sa valeur, peut être de sa mort prochaine…

Il faut dire que les explications de stimulent notre réflexion et attisent notre curiosité tout du long. Le public a été très concentré et a pu (même si c'est avec difficulté) respecter la demande expresse de Jean-Marc Andrieu de réserver les applaudissements à la fin du concert. Ils ont enfin pu fuser de toute part, récompensant la démarche artistique rigoureuse, la perfection de l'interprétation et surtout un plaisir de faire la musique ensemble, réconfortant. Suivre la prochaine saison des Passions sera une priorité.

Crédit photographique : © JJ Ader

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Toulouse. Chapelle Sainte-Anne. 24. IV. 2007. Motets et cantates de Dietrich Buxtehude (1637-1707), Georg Böhm (1661-1697), Nikolaus Bruhns (1665-1697), Lovies Busbetzky( ?- ?) ; Gilles Cantagrel (présentation) ; Anne Magouët, soprano ; Jean-Louis Comoretto, alto ; Sebastien Obrecht, ténor ; Stephan Imboden, basse ; Flavio Losco, Nirina Bougés, violons ; Jennifer Lutter, alto ; Etienne Mangot, viole de gambe ; Jean-Paul Talvard, violone ; Yasuko Bouvard, orgue ; direction : Jean-Marc Andrieu.

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