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Dijon. Auditorium, 27-III-2007. Directeur artistique et scénographie : Masa Ogawa. Costumes : Akko Ogawa. Lumières : Shingo Matchy Matsumoto. Manager : Chisako Ninomaya. Manager Europe : Steven Kroon. Son : Erik Bouwmeester. Groupe Yamato : Takeru Matsushita, Satomi Ikeda, Midori Tamai, Tetsuro Okubo, Toko Kawauchi, Takaoki Masui, Saori Higashi, Marika Nito, Maiko Doi, Gen Hidaka, Misato Sugiyama.
Un torse musclé émerge de l’ombre derrière un énorme tambour. L’homme se tient immobile, les bras levés, tenant deux bâtons croisés au-dessus de sa tête. Petit à petit, les spots rouge sang éclairent faiblement d’autres silhouettes dans la même posture : dix, ils sont dix, harmonieusement disposés sur la scène. A un mystérieux signal reconnu d’eux seuls, ils abaissent leurs bras sur l’instrument et le frappent avec une formidable énergie. Voici le groupe Yamato, les tambours du Japon.
Yamato est le nom qu’on donne à la musique d’origine japonaise pratiquée aux VIIe et VIIIe siècles, à l’époque Nara, par opposition à la musique d’origine coréenne komagaku et à la musique d’origine chinoise tôgaku. Toutes les trois étaient alors pratiquées à la Cour de Nara ; regroupées sous le vocable de gagaku, elles témoignent à la fois des influences exercées par les courants religieux et artistiques des Cours de Corée et de Chine, et du syncrétisme qui s’opère alors entre confucianisme, bouddhisme et shintoïsme.
Le groupe Yamato comprend onze membres, cinq femmes et six hommes, jeunes et d’une énergie débordante servie par des corps de danseurs. Ils sont vêtus sobrement en noir dans la première partie, puis en rouge et noir dans la seconde, avec une référence constante au costume national. Ils utilisent des instruments traditionnels, surtout des membranophones, d’où leur nom, mais aussi le shamisen, sorte de banjo ancien, la shinabue, flûte traversière de bambou, des gongs et des cymbales métalliques à main appelées chappa ou tebyouchi. Les tambours semblent conformes aux tambours traditionnels taïko. Le plus gros fait 1, 30 m de diamètre de peau tendue sur les deux côtés d’une sorte de tonneau fait en bois de zelkova, vieux de plusieurs centaines d’années. Le shinto est une religion panthéiste et on comprend que frapper un tel instrument doit nous mettre en communication avec le monde spirituel. Les taïko étaient utilisés pour des rites religieux, pour des processions, pour demander de bonnes récoltes de riz, etc.
Le spectacle est conçu de façon à nous faire ressentir cet aspect rituel, et il est vrai que le son des tambours nous invite à pénétrer dans un monde magique par la beauté de leurs timbres, et par leur force aussi, qui a obligé à voiler de velours les bas côtés de l’auditorium ! Le coup, beat en jazz, doit relier le groupe Yamato aux spectateurs, car il est le symbole des cœurs qui battent en résonance des pulsions : il s’agit bien là d’une sorte de communion dans une énergie qui circule et doit dynamiser chaque spectateur.
Les pièces interprétées ne sont pas des pièces anciennes exhumées par Yamato ; Il s’agit d’une sorte de relecture moderne de l’esprit de la musique traditionnelle. Les différentes parties du spectacle font participer des groupes différents, allant de un à dix. Les timbres aussi sont variés : petits tambours à son clair, banjos shamisen, tutti. Les compositions s’organisent autour du principe de répétition des formules, mais très sophistiqué, utilisant souvent des mélodies de timbres ou des nappes sonores. Comme dans le jazz, il y a des ruptures, rythmiques ou dynamiques. La virtuosité des instrumentistes est bien réelle et la force de leur jeu réside autant dans la synchronisation que dans leur engagement physique assumé avec une joie évidente. Leurs postures sont très orientales : ils sont debout derrière leurs instruments, les pieds chaussés, puis nus, les jambes écartées en compas, bien plantées sur le sol, comme le fait un karatéka. La façon d’abattre le bâton pour percuter le tambour, d’abord les bras tendus levés vers le ciel, puis en frappant violemment la peau, fait penser à un coup de sabre ou au trajet d’une flèche. Les interventions vocales de l’ensemble imitent les cris des sports de combat.
Le spectacle évolue vers l’humour et le jeu interactif avec le public, en partie composé de jeunes. L’allusion au jeu de tennis avec deux tambours à membrane unique uchiwa-daïko est parfaitement réussie ; le trio de joueurs de cymbalettes se chipant le son est aussi très drôle. Et que dire du spectacle qu’offre l’auditorium frappant dans les mains et renvoyant des formules rythmiques incitées par un membre de Yamato !
L’idée directrice du show apparaît clairement : se servir du son des tambours, instruments traditionnels exotiques, permet de toucher au plus profond de chacun, car sous toutes les latitudes ce son évoque la musique dans son essence la plus primitive. En entrant en résonance avec le corps de chaque auditeur, il réveille puis fait irrésistiblement circuler l’énergie vitale. La couleur rouge, les attitudes liées à la culture orientale apportent le sentiment de dépaysement. Le professionnalisme évident des musiciens en renforce l’efficacité et leur permet de toucher un public de tous les âges et de toutes nationalités : les tournées triomphales de Yamato en Asie, en Europe et en Amérique sont pour eux « la plus grande des sources d’énergie ».
Crédit photographique : © Lucienne van der Mijle
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Dijon. Auditorium, 27-III-2007. Directeur artistique et scénographie : Masa Ogawa. Costumes : Akko Ogawa. Lumières : Shingo Matchy Matsumoto. Manager : Chisako Ninomaya. Manager Europe : Steven Kroon. Son : Erik Bouwmeester. Groupe Yamato : Takeru Matsushita, Satomi Ikeda, Midori Tamai, Tetsuro Okubo, Toko Kawauchi, Takaoki Masui, Saori Higashi, Marika Nito, Maiko Doi, Gen Hidaka, Misato Sugiyama.