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Paris. Maison de Radio France. 16-II-2007. Thomas Adès (né en 1971) : Brahms pour baryton et orchestre ; Benoit Mernier (né en 1964) : An die Nacht pour soprano et orchestre ; Michel Fourgon (né en 1968) : Filigranes ; Pascal Dusapin (né en 1955) : Exeo. Laure Delcampe, soprano ; Thomas Bauer, baryton ; Orchestre Philharmonique de Liège, direction Pascal Rophé.
C'est l'Orchestre Philharmonique de Liège conduit par son nouveau chef titulaire Pascal Rophé qui était venu défendre la musique d'aujourd'hui – et notamment ses compatriotes belges – lors du deuxième week-end du festival Présences dans la Salle Olivier Messiaen de Radio France.
Le programme mettait bien sûr à l'honneur l'invité de ce Festival, « Adès le voyageur » comme le titre Hélène Cao dans sa monographie consacrée au compositeur et parue, pour l'occasion, aux éditions Musica Falsa – et prochainement chroniquée dans ResMusica. Le dépaysement est en effet assuré avec ce musicien aimant à varier ses références dans un jeu souvent très virtuose qui consiste à s'approprier les citations retenues et les couler dans son propre langage.
Tel est bien le propos de Brahms qui débutait le concert, une œuvre concise écrite en 2001 par le jeune compositeur anglais sur un texte d'Alfred Brendel dans lequel « le fantôme malodorant de Brahms hante une maison et joue du piano tard le soir ». Thomas Adès part de citations authentiques – cette tierce descendante qui nourrit bon nombre de thèmes brahmsiens et dont il fait le matériau essentiel de son « lied » – et s'engage dans une écriture qui s'éloigne de son modèle tout en maintenant, de façon toujours très critique, la densité de la texture instrumentale et un climat orchestral très sombre sollicitant deux contrebassons. Thomas Bauer lui tient tête avec une efficacité dramatique étonnante, très à l'aise avec un texte dont il fait admirablement ressortir la dérision.
On restait dans une atmosphère nocturne avec l'œuvre, très poétique cette fois, du compositeur bruxellois Benoît Mernier, An der Nacht (hymne à la nuit) sur un poème de Novalis. Déployant un très gros orchestre dont Mernier recherche la transparence et le raffinement des timbres, l'œuvre déborde les cadres du lied, inscrivant la ligne de chant dans la texture orchestrale en un vaste poème symphonique avec voix dont le temps très étiré traduit la durée éternelle du sommeil « de ceux qui se sont voués à la nuit ». La voix sensuelle et ondoyante de Laure Delcampe auréolée des sonorités instrumentales parvient à tisser un univers poétique dans lequel on plonge avec délices.
En seconde partie de concert, Filigranes de Michel Fourgon – compositeur belge formé aux côtés de Claude Ledoux et Patrick Lenfant – laisse également transparaître des références, celles de personnalités qui ont fortement marqué le compositeur – Fellini, Mondrian, Proust – et nourrissent son imaginaire. A travers une écriture orchestrale protéiforme, l'œuvre juxtapose cinq épisodes très diversifiés qui jouent sur l'hétérogénéité du matériau et du traitement instrumental, installant parfois des mécanismes répétitifs d'une belle efficacité sonore.
L'Orchestre Philharmonique de Liège qui avait ce soir le vent en poupe terminait la soirée avec l'œuvre en création de Pascal Dusapin, Exeo, « cinquième solo pour orchestre d'un cycle qui en comportera sept » : Une œuvre incandescente et visionnaire – elle est dédiée à son maître Xenakis – dans laquelle Dusapin, avec la pleine maîtrise de son écriture, traite la matière orchestrale par larges pans de couleurs vives à la Rothko dont l'intensité concentre la charge émotive. La force énergétique qui fuse de chaque pupitre instrumental engendre une dimension cosmique qui rappelle l'univers de son dernier opéra, Faustus, the last night et mesure l'envergure du propos.
Tenant les rênes de son orchestre avec une énergie et un enthousiasme communicatifs, Pascal Rophé, maître d'œuvre de la soirée, terminait le concert en apothéose, confirmant les qualités de l'orchestre de Liège et l'exigence de son travail dans un répertoire qui constitue son domaine d'élection.
Crédit photographique : © Jean-Luc Tillière
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Paris. Maison de Radio France. 16-II-2007. Thomas Adès (né en 1971) : Brahms pour baryton et orchestre ; Benoit Mernier (né en 1964) : An die Nacht pour soprano et orchestre ; Michel Fourgon (né en 1968) : Filigranes ; Pascal Dusapin (né en 1955) : Exeo. Laure Delcampe, soprano ; Thomas Bauer, baryton ; Orchestre Philharmonique de Liège, direction Pascal Rophé.