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Montréal. Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. 4-XI-2006. Giuseppe Verdi (1813-1901) La Traviata, opéra en trois actes sur un livret de Francesco Piave. Mise en scène : Jacques Leblanc. Décors : Claude Goyette. Costumes : Anne Séguin-Poirier. Éclairages : Matthieu Gourd. Avec : Yuli-Marie Williams, Violetta Valéry ; Dimitri Pittas, Alfredo Germont ; Mireille Lebel, Flora Bervoix ; Stephen Kechulius, Giorgio Germont ; Julie Daoust, Annina ; Antonio Figueroa, Gaston, Vicomte de Letorières ; Alexandre Sylvestre, Le Baron Douphol ; Marc Belleau, Le Marquis d’Obigny ; Gregory Atkinson, Le docteur Grenvil ; Thomas Macleay, Giuseppe ; Antoine Bélanger, un Commissaire. Chœur de l’Opéra de Montréal (Pianiste-répétiteur, Claude Webster). Orchestre Métropolitain du Grand Montréal (OMGM). Direction musicale et de chœur : James Meena.
On ne peut certes pas reprocher à l'OdM d'avoir misé sur une valeur sûre afin de remplir ses coffres et de reconquérir son public. De tous les opéras de Verdi, La Traviata est sans doute l'œuvre la plus souvent représentée sur les scènes lyriques.
Une dévoyée trouve l'amour mais doit abandonner son amant sous la pression sociale et les contraintes familiales. Elle renoncera à son bonheur, même si ses jours sont comptés. C'est le drame bourgeois par excellence, celui de la femme sacrificielle chère à Verdi, indissociable de son époque, de ses références culturelles et de son environnement.
Mais la nouvelle production montréalaise tient-elle toutes ses promesses ? Les décors simplistes de Claude Goyette renvoient d'un tableau à l'autre la sempiternelle structure de fer amovible et n'apportent rien de réellement original. La mise en scène de Jacques Leblanc, si elle est insipide, a du moins le mérite tout relatif de peu déranger la pièce. Fort heureusement, l'efficacité dramatique est contenue dans la musique même de Verdi. Faut-il rappeler que le metteur en scène a tenu à préciser, en conférence de presse, que l'action se déroulerait dans les années 50 du vingtième siècle ? Cela n'ajoute strictement rien à l'œuvre. Dès le lever du rideau, que de stéréotypes ressassés à l'infini, à commencer par la bâche blanche où sont entassés le mobilier et les accessoires, dans la demeure de Violetta, et l'ombre errante des protagonistes, isolés par une glace imaginaire !
Les costumes d'Anne Séguin Poirier ont du style, mais pour quelle raison a-t-on affublé l'héroïne d'une robe parachute rouge ? Le corps potelé de la prima donna est corseté sous une montagne froufroutante de crinolines. Au dernier tableau, on la verra cette fois-ci revêtue d'une chemise de nuit rouge acidulée. L'arrivée du docteur Grenvil de Gregory Atkinson, en chemise et bretelles ressemble davantage à celle d'un ouvrier venu faire quelques travaux de plomberie. Le chœur de l'Opéra de Montréal, laissé à lui-même, semble gommé par une mise en scène exsangue. Il lui manque la vie foisonnante, le contexte et l'air ambiant dans lesquels on a l'habitude de le voir évoluer. L'OMGM sous la direction de James Meena est sans grande envergure et manque de force et de couleurs. Enfin, le corps de ballet brille par son absence ; il est ridiculement remplacé par une quelconque pantomime tenue par le chœur. L'arrivée d'Alfredo en imper démontre le peu d'enthousiasme de l'amant et son jeu se veut ostensiblement maladroit.
On pourrait reprocher à la Violetta de Yuli-Marie Williams un manque de justesse, mais la voix est fort belle et la soprano n'est pas dépourvue de talent. Elle est tout à fait remarquable au premier acte, avec un «E strano… Ah, fors'è lui… Sempre libera» avec les contre notes ajoutées, marqué d'un tonnerre d'applaudissements. C'est une interprète athlétique qui chante tout d'un bloc, ne ressent jamais la fatigue et laisse rarement paraître l'émotion dans la voix, que ce soit dans le duo avec Alfredo, «Un di, felice, eterea» ou celui, plus développé dramatiquement, avec le père Germont, «Pura siccome un angelo…Morro, ma la mia memoria». Finalement, la solitude de Violetta est un plat qui se mange froid. Elle fait fi de la maladie qui pourtant l'emportera. L'Alfredo de Dimitri Pittas est un ténor qui tient ses promesses vocalement. Gauche à son arrivée sur scène au premier acte, il se dégourdit assez vite avec le «Libiamo, libiamo». Mais que de distance, que de froideur entre les deux amants ! Quant à Giorgio Germont, tenu par le baryton Stephen Kechulius, si la voix détonne en maints endroits, il lui reste la prestance du père autoritaire et un affinement dans la progression de son rôle.
Mention honorable pour la sémillante Flora de la mezzo Mireille Lebel et l'Annina de la soprano Julie Daoust. Le reste de la distribution est à la hauteur des attentes.
Enfin, Violetta meurt debout, par lyophilisation, un procédé de déshydratation sous vide, séparée de son amant par une glace imaginaire. On n'en demandait pas tant.
Crédit photographique : © Yves Renaud
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Montréal. Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. 4-XI-2006. Giuseppe Verdi (1813-1901) La Traviata, opéra en trois actes sur un livret de Francesco Piave. Mise en scène : Jacques Leblanc. Décors : Claude Goyette. Costumes : Anne Séguin-Poirier. Éclairages : Matthieu Gourd. Avec : Yuli-Marie Williams, Violetta Valéry ; Dimitri Pittas, Alfredo Germont ; Mireille Lebel, Flora Bervoix ; Stephen Kechulius, Giorgio Germont ; Julie Daoust, Annina ; Antonio Figueroa, Gaston, Vicomte de Letorières ; Alexandre Sylvestre, Le Baron Douphol ; Marc Belleau, Le Marquis d’Obigny ; Gregory Atkinson, Le docteur Grenvil ; Thomas Macleay, Giuseppe ; Antoine Bélanger, un Commissaire. Chœur de l’Opéra de Montréal (Pianiste-répétiteur, Claude Webster). Orchestre Métropolitain du Grand Montréal (OMGM). Direction musicale et de chœur : James Meena.