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Lyon. Opéra. 19-X-2006. Richard Wagner (1813-1883) : Lohengrin, opéra romantique en trois actes sur un livret du compositeur. Mise en scène : Nikolaus Lehnhoff. Décors : Stephan Braunfels. Costumes : Bettina Walter. Eclairages : Duane Schuler. Collaboration aux mouvements : Denni Sayers. Maître d’arme : Winni Engber. Avec : Hugh Smith, Lohengrin ; Gunnel Bohman, Elsa ; Evelyn Herlitzius, Ortrud ; Hans Sotin, le roi Henri ; Tom Fox, Telramund ; Brett Polegato, le Hérault du roi ; Brian Bruce, Philippe Maury, Paolo Stupenengo, Jean-Richard Fleurençois, nobles brabançons ; Pei-Min Yu, Sharona Applebaum, Marie-Lys Langlois, Florence Villevière-Nermel, les pages. Chœurs de l’Opéra de Lyon (chef de chœur : Alan Woodbridge), Orchestre de l’Opéra de Lyon, direction : Lothar Koenigs

Sans doute avions-nous trop espéré du retour de Wagner à Lyon après des décennies de purgatoire!

Avouons-le sans ambages, ce Lohengrin s'est révélé décevant. L'Opéra avait pourtant mis les petits plats dans les grands, en s'associant avec le Festpielhaus de Baden-Baden et la Scala de Milan, pour commander un spectacle digne de ce nom à , acclamé in loco grâce à ses brillants Janáček. Pour mener à bien son projet, le régisseur allemand s'est entouré de Stephan Braunfels, l'architecte talentueux dont tout le monde parle depuis qu'il a construit les nouveaux bâtiments du Bundestag à Berlin. Créé à Baden-Baden avec un succès mitigé, cette nouvelle production n'a pas soulevé l'enthousiasme du public lyonnais, récoltant même quelques huées lors de la première. Un tel accueil laisse songeur tant , sans doute l'un des metteurs en scène les plus intègres de l'époque, n'a pas cherché à dénaturer l'opéra romantique de Wagner en commettant l'une de ces transpositions ubuesques qui polluent les scènes allemandes. De même, il a fui l'illustration naïve et simpliste, genre beau livre d'images plus ou moins digeste, à la August Everding. Le metteur en scène a délibérément choisi la sobriété, faisant un usage admirable des lumières mais aussi de l'imposant décor de Stephan Braunfels, tour à tour hémicycle, estrade ou escalier, qui permet à sa direction d'acteurs de s'épanouir en toute liberté. Dans la lignée de ses Janáček, poignants et troublants d'éclats de vérités impromptus, ce Lohengrin fait la part belle aux acteurs-chanteurs, dépouillés de leurs déambulations erratiques, délestés de leurs poses empruntées. Si l'on apprécie l'intelligence de la confrontation Ortrud-Telramund au deuxième acte, à l'intensité digne d'une tragédie grecque, et la sensibilité du duo Ortrud-Elsa, on sera plus perplexe quant au traitement réservé à Lohengrin, chevalier-artiste, dont l'allure néodisco est celle d'un Patrick Juvet obèse, et à une Elsa maniaco-dépressive, bien éloigné de la créature fragile et illuminée que l'on attend. En sus, que doit-on penser de l'inévitable transposition dans l'Allemagne d'avant-guerre, peu originale et ici particulièrement insipide (les robes en tulle d'Elsa).

La distribution réunie à Lyon (on aurait bien aimé entendre Waltraud Meier et Solveig Kringelborn, respectivement Ortrud et Elsa à Baden-Baden… ) a donné, dans son ensemble, une image assez peu flatteuse du chant wagnérien. A commencer par Lohengrin en personne, un au chant fruste et gris, dont les démonstrations de puissance vocale au dernier acte n'auront pas fait oublier de désagréables sonorités étranglées et un bien vilain falsetto. Par respect pour cet estimable ténor, en méforme évidente à Lyon, nous ne réveillerons pas les mânes des Konya, Windbergh et autres Seiffert qui ont composé des chevaliers au cygne autrement emballants. (Elsa) hérite de toutes les représentations après le retrait d'Inga Nielsen, dont on sait de source sûre qu'à l'instar d'une célèbre soprano américaine en résidence à Munich, elle a été remerciée pour insuffisance vocale. Scrupuleuse musicienne, la soprano incarne une Elsa livide et falote dont le chant dépourvu de grâce, de rayonnement, de charme, prosaïque en somme, ne nous a jamais captivé. Sans avoir tout à fait les moyens du rôle d'Ortrud, qu'elle interprète avec un aplomb scénique époustouflant, est pourtant le seul élément de la distribution authentiquement wagnérien (à l'exception d'Hans Sotin toujours imposant en roi Henri). Rien à redire d'un chant suprêmement maîtrisé et puis, nous sommes des admirateurs de ce timbre féminin et onctueux, qui a fait d'elle une des plus belle Brünnhilde du récent Bayreuth. Seul rescapé de la création à Baden-Baden, propose un Telramund vigoureux et sonore, bien qu'un peu trop monolithique pour tout à fait séduire. Très bon Hérault de , éloquent comme il se doit. Un grand bravo aux chœurs de l'Opéra de Lyon, irréprochable à tous égards, et à l'orchestre, splendide (quels cuivres!), dirigé avec talent par un Lothar Kœnigs, plus soucieux d'équilibre sonore que de lyrisme. En cela, sa direction, un peu comme la mise en scène, aura manqué de poésie et de souffle -à la fois épique et mystique.

Crédit photographique : © Alain Franchella / Bertrand Stofleth

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