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Magny-les-Hameaux. Granges de Port-Royal. 24-IX-2006. Johannes Brahms (1833-1897) : Romanzen « La Belle Maguelone » op. 33. Nicole Aubry, mise en scène. Vincent Le Texier, baryton ; Susan Manoff, piano ; Rona Hartner, récitante.
La belle Maguelone mise en scène
La Belle Maguelone mise en scène ! Une fausse bonne idée, mal réalisée … Un cycle de lieder, c'est de la poésie, pas du théâtre, une suite de moments de grâce quand il s'agit de Schubert, de Schumann, de Wolf ou de Strauss. Le cycle de romances La Belle Maguelone de Johannes Brahms entre exactement dans ce cadre ! Mais le piège, c'est qu'il raconte une histoire, de l'époque médiévale en plus ! … L'histoire de Pierre de Provence, dont la source est un poème écrit à la fin du XIIème siècle par Bernard de Trèves, chanoine de Maguelone, ensuite adapté et repris par le romantisme allemand, et dont la version de Ludwig Tieck trouva le meilleur écho en la musique de Brahms composée entre 1861 et 1868. Pierre quitte son pays et les siens pour rencontrer le vaste monde ; ce faisant, il croise et séduit la belle Maguelone ; après s'être perdus, ils se retrouvent et le dernier poème du cycle consacre la réunion des deux amants. Le cycle ne décrit pas, ne raconte pas l'histoire, il la commente. D'où, à partir du texte de Ludwig Tieck, l'idée d'une mise en scène réalisée par Nicole Aubry, qui nous donne une alternance de saynètes jouées sur scène par une récitante, Rona Hartner, à qui les musiciens, Susan Manoff, piano, et Vincent Le Texier, baryton, donnent occasionnellement la réplique, et de 13 des 15 lieder du cycles qui commentent l'action.
Malheureusement plusieurs ennuis entravent gravement cette idée : l'entame s'opère par un chant « méditerranéen » accompagné à la guitare – référence déplacée à l'origine médiévale du cycle ? on se demande vraiment ce que ça vient faire là ! puis la chanteuse-guitariste, assez amateur au demeurant, Rona Hartner, devient récitante-actrice ; mais son élocution est difficilement compréhensible, que cela tienne à la salle, très longue, votre serviteur était placé très au fond, à son port de voix ou à sa diction… La mise en scène naïve n'apporte rien ou nuit à la compréhension du texte dit, car rappelons-le, histoire n'est pas synonyme d'action dramatique… Dans les lieder, Vincent Le Texier, dont la qualité vocale est très mal rendue dans cette splendide Grange de Port Royal, dotée d'une magnifique charpente en berceau, mais dont l'acoustique est très sèche…. ; seule surnageait la formidable écriture pianistique brahmsienne, grâce à cette merveilleuse accompagnatrice qu'est Susan Manoff ; dans l'enchaînement elle a eu l'excellente idée d'insérer un court mais très bel extrait de l'intermezzo en la majeur de l'opus 118, dont elle nous a donné une bien belle lecture.
Le Festival d'Ile de France dont le projet est de marier la musique à de superbes sites historiques, se doit d'être plus exigeant sous peine de perdre rapidement un public qui manifestement ne demande qu'à être fidèle, comme en témoignèrent les applaudissements tristement retenus de fin de spectacle.
Cette production qui part en tournée trouvera sans doute rapidement ses améliorations techniques. Malheureusement, du fait du contresens dont elle témoigne, elle ne valorise pas et ne pas permet la découverte, pourtant bien nécessaire en France, de ce cycle romantique merveilleux qu'est La Belle Maguelone de Johannes Brahms.
Crédit photographique : © DR
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Magny-les-Hameaux. Granges de Port-Royal. 24-IX-2006. Johannes Brahms (1833-1897) : Romanzen « La Belle Maguelone » op. 33. Nicole Aubry, mise en scène. Vincent Le Texier, baryton ; Susan Manoff, piano ; Rona Hartner, récitante.