Du chœur à l’ouvrage pour Sylvain Cambreling

Sylvain Cambreling est un chef de paradoxe dont la curiosité est insatiable. Alors qu'il multiplie, au grand regret d'une partie du public, ses apparitions dans la fosse de l'Opéra de Paris, il nous offre un très beau disque où il dirige l'EuropaChorAkademie dans des œuvres assez rares de la musique française.

Le présent album se veut un voyage à travers des partitions plus ou moins inspirées de la chanson française de la Renaissance. Le programme s'ouvre par Le Bestiaire, Cinq fables d'animaux extraites de « Le Bestiaire ou le cortège d'Orphée » de Guillaume Apollinaire, de Jean Absil. Professeur de composition au Conservatoire de Bruxelles, Absil œuvra sans compter pour la diffusion de la musique de son temps. Il est à l'origine des premières belges du Sacre du Printemps et du Pierrot lunaire. Musicien à l'ouverture d'esprit exemplaire, il expérimenta, à la suite de Bartòk, la musique polytonale. Ces courtes pièces, joviales et mélancoliques, montrent un musicien influencé par une certaine esthétique française. Ce disque se clôt par les inattendues Six chansons d'après des poèmes français de Vergers de Rainer Maria Rilke. Peu soupçonné de familiarité avec la musique française, le grand Hindemith réussit pourtant à saisir la simplicité, la légèreté et la finesse de ce style si particulier. Entre ces deux partitions, les artistes nous offrent un florilège de Ravel, Debussy et Poulenc. On se régalera en particulier de la Cantate Un soir de Neige du compositeur du Dialogue des Carmélites.

Fondée en 1997, l'EuropaChorAkademie est un chœur-école composé de jeunes musiciens issus des pays européens arrivés au terme de leur formation. Cette institution basée à Francfort, Brême et Berlin collabore souvent avec les orchestres de radio allemands et même avec le festival d'Aix-en-Provence. D'un haut niveau technique et de cohésion, la formation est conduite par un Sylvain Cambreling qui sait inculquer à ses jeunes troupes l'énergie et le style indispensables à cette musique. On regrettera juste un léger manque de souplesse et une certaine uniformité dans l'approche des différents compositeurs.