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Création concertante de Fiesque, premier opéra de Lalo, au Festival de Radio-France

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Montpellier. Opéra-Berlioz. 27-VII-2006. Edouard Lalo (1823-1892) : Fiesque, opéra en 3 actes sur un livret de Charles Beauquier. Version de concert-création mondiale. Avec : Roberto Alagna, Fiesque ; Michelle Canniccioni, Léonore ; Béatrice Uria-Monzon, Julie  ; Franck Ferrari, Verrina ; Jean-Sébastien Bou, Hassan ; Armando Gabba, Borgonino ; Vladimir Stojanovic, Gianettino ; Ronan Nédélec, Romano. Chœur de la Radio Lettone (chef de chœur : Sigvards Klava) ; Orchestre National de Montpellier, direction : Alain Altinoglu.

Les deux opéras que composa Edouard Lalo (1823-1892) n'auraient pu connaître destins plus différents.

Tandis que son deuxième opéra, le Roi d'Ys, connut le succès et une grande popularité, Fiesque ne fut jamais représenté. En effet, pour son premier essai lyrique, le compositeur, mieux connu par sa Symphonie Espagnole, rencontra de nombreuses difficultés. Lalo avait proposé son opéra à l'automne 1868 lors d'un concours qui devait promouvoir l'écriture de nouvelles œuvres lyriques et reçut le troisième prix. Une polémique naissait alors, qui défendait l'œuvre de Lalo, entretenue par le librettiste, au grand désespoir du compositeur qui se serait passé de cette publicité au parfum de querelle. Puisqu'il n'était pas joué à Paris, c'est vers Bruxelles que se tourna le compositeur. Le contrat signé, le directeur du Théâtre de la Monnaie était relevé de ses fonctions et son successeur exigeait tant de modifications que ce fut Lalo qui renonça à cette collaboration en août 1872. En 1875, les démarches de Gounod en faveur de la création de Fiesque redonnèrent un temps espoir à Lalo mais restèrent infructueuses. Puisqu'il continuait à jouer de malchance, Lalo donna en concert de nombreux extraits de son opéra et finit par souhaiter de ne jamais le voir joué.

L'argument s'inspire d'une pièce de jeunesse de Schiller, Die Verschwörung des Fiesco zu Genua. L'action se déroule à Gênes en 1547. Fiesque est le chef d'une conjuration envers la famille régnante des Doria. Il doit également faire face à Verrina, vieux républicain qui se méfie de ce jeune homme ambitieux et jouisseur. Léonore, la jeune épouse de Fiesque, est jalouse de Julie, fille d'Andreas Doria, dont Fiesque semble être tombé amoureux. Les Doria finiront par être renversés mais Verrina refuse de laisser Fiesque accéder au pouvoir et le jette dans les eaux du port où il se noie.

Il est de tradition à Montpellier d'exhumer des partitions oubliées. Avec un bonheur inégal. Oublié notre enthousiasme sans réserve face à la Salomé d', que l'on a pu apprécier à Montpellier en version concertante lors du Festival 2004 puis en version scénique en décembre 2005. Le sujet de la pièce de Schiller a beau être porteur, les talents de librettiste de Beauquier laissent par exemple dubitatif. Que dire de la partition de Lalo ? Son opéra s'inscrit dans la tradition de l'opéra français, pas bien éloigné de Berlioz ou Gounod, sans prétendre rivaliser avec eux. On admire néanmoins de somptueuses parties d'orchestre, l'entracte par lequel débute l'acte II et l'air le songe de Fiesque que de nombreux ténors ont intégré à leur répertoire malgré le fait que l'opéra n'ait jamais été créé. La version de concert permet de mieux apprécier musique et voix. L'opéra subit quelques coupures, sans incident sur la compréhension. A la tête de l'Orchestre National de Montpellier, opte pour des tempi précis et aérés. Les membres du Chœur de la Radio Lettone sont certes musiciens mais trop peu idiomatiques.

Est-ce vraiment Lalo, ou plutôt , qui attire les foules au point que l'Opéra-Berlioz affichait complet depuis plusieurs mois ? L'épouse du ténor, Angela Gheorghiu devait également prendre part à la création en version de concert de Fiesque. Des huées assez nourries marquèrent l'exaspération du public devant la désinvolture de la chanteuse. En effet, après avoir entretenu le doute quelque temps, elle annulait sa participation, jugeant le rôle de Léonore trop éloigné de ceux qu'elle tient actuellement. C'est Michelle Canniccioni qui la remplaçait brillamment. , belle diction et puissance imposante, rassure ses admirateurs après son Radamès très controversé des Chorégies d'Orange, sans avoir encore retrouvé sa sûreté d'antan qui en avait fait l'un des meilleurs défenseurs du répertoire français – merveilleux Hoffmann ! Il se permet quelques fautes assez grossières. Du côté des barytons, est un Verrina prestigieux quoi qu'un rien monolithique tandis que crée le rôle comique d'Hassan. Sa diction précise et son chant expressif confirment si besoin était sa place de valeur montante du chant français. La distribution féminine appelle également les éloges. L'aigu clair, le port de voix altier de Michelle Canniccioni créent un beau personnage de Léonore. Et il ne fallait pas moins que le capiteux mezzo de pour créer celui de Julie. Le rôle, composé expressément pour l'épouse du compositeur, recèle un morceau de choix, l'air « Mon plaisir à moi ». Uria- Monzon y excelle et nous fait rêver de ses Habanera et Séguédille toulousaines en 2007. Lors d'une mise en scène, il ne fait pas de doute que cette distribution très honorable ait fait oublier la relative faiblesse de l'œuvre.

Crédit photographique : © DR

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Montpellier. Opéra-Berlioz. 27-VII-2006. Edouard Lalo (1823-1892) : Fiesque, opéra en 3 actes sur un livret de Charles Beauquier. Version de concert-création mondiale. Avec : Roberto Alagna, Fiesque ; Michelle Canniccioni, Léonore ; Béatrice Uria-Monzon, Julie  ; Franck Ferrari, Verrina ; Jean-Sébastien Bou, Hassan ; Armando Gabba, Borgonino ; Vladimir Stojanovic, Gianettino ; Ronan Nédélec, Romano. Chœur de la Radio Lettone (chef de chœur : Sigvards Klava) ; Orchestre National de Montpellier, direction : Alain Altinoglu.

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