Tandis que ses musiciens et chanteurs s'offraient une saison nomade à la rencontre des rouennais, restés fidèles, le Théâtre de Arts de Rouen subissait une rude et radicale cure de jouvence.
Cette institution rouennaise inaugurée sous ce nom en 1776, incendiée (accidentellement ?) un siècle plus tard jour pour jour, rebâtie à l'emplacement même des cendres encore chaudes en 1882, mise à mal par la sinistre semaine rouge qui réduisit en poussière une grande partie de la ville en mai 44 fut finalement rasée en 1946. Il fallut attendre 1962 pour que le phénix renaisse de ses cendres sous une architecture contemporaine et forte des techniques de scène alors en pointe. Quarante années ont passé, les techniques et les jeux de scène ont évolué, laissant l'obsolescence s'installer insidieusement, comme l'expliquait le député maire de Rouen, Pierre Albertini, lors de la conférence de presse du 7 juin dernier. Insidieusement et dangereusement surenchérissait Yves Jouen, le directeur technique de l'opéra. Les décors beaucoup plus lourds aujourd'hui qu'hier ont eu progressivement raison des portages presque tous cassés. Après plusieurs mois de recherches, l'opéra a opté pour la plus grande technicité du moment avec plus de 50 levages motorisés et non plus manuels (d'une puissance de 5 tonnes), tous gérés par ordinateur avec une précision réellement chirurgicale, comme le prouva la démonstration qui suivit la conférence de presse.
Une cure de jouvence de haut niveau
Les travaux furent également l'occasion de créer une fosse plus profonde dotée d'un nouveau revêtement pour une meilleure acoustique, avec élévateur, afin de moduler l'espace scénique. Le coût de 5, 8 millions d'euros est supporté par la mairie, le conseil général et le conseil régional à hauteur de 24% chacun. Il est dommage que l'Agglomération, de couleur politique différente, ait fait passer son opposition avant l'intérêt de la culture en ne participant que modestement, handicapant ainsi les futurs travaux prévus pour l'administration, les loges et le foyer.
Quoiqu'il en soit, voici désormais l'Opéra de Rouen doté d'une salle à la hauteur de ses ambitions et du talent de ses divers ensembles, comme nous le démontrera, à n'en pas douter, le concert inaugural du 23 juin prochain qui devrait ravir le tout Rouen réuni autour d'Oswald Sallaberger et de Mozart, dans Così fan Tutte.
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