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Bruxelles. Théâtre Royal de la Monnaie. 27-XII-2005. Richard Wagner : (1813-1883) : Der Fliegende Holländer, opéra romantique en 3 actes sur un livret du compositeur. Mise en scène : Guy Cassiers ; décors : Peter Missotten ; vidéos : Kurt d’Haeseleer et Peter Missotten ; costumes : Frédéric Denis et Isabelle Lhoas ; lumières : Enrico Bagnoli ; chorégraphie : Adrienne Altenhaus et Fabian Galama. Avec : Tómas Tómasson, Der Holländer ; Hélène Bernardy, Senta ; Alfred Reiter, Daland ; Robert Chafin, Erik ; Jacqueline Van Quaille, Mary ; Jörg Schneider, Der Steuermann. Orchestre symphonique et chœur de la Monnaie (Chef de chœur : Piers Maxim). Direction musicale : Kazushi Ono.
On allait voir ce qu'on allait voir avec ce Vaisseau fantôme à la Monnaie, pour lequel on avait mis les petits plats dans les grands : metteur en scène à la mode, dispositif vidéo mis en place par De Filmfabriek, un collectif d'avant-garde, retransmission télévisée en direct sur Arte et la RTBF, deux distributions de niveau supposé international et le maestro Ono pour creuser les vagues.
Une réunion de talents aussi considérables aurait dû nous donner un spectacle marquant, or la principale caractéristique de cette mise en scène est l'insignifiance : il ne se passe rien ou presque. Pas de direction d'acteurs : avant d'arriver au devant de la scène pour chanter leur partie raides comme des piquets et les bras écartés comme dans les années cinquante, les personnages errent sur un plateau à peu près nu, à part deux grands demi-cercles cuivrés qui sont, si l'on a bien compris, censés représenter des coques de navires, et qui tournent autour de leur axe à des vitesses variables. Même indigence pour les déplacements des choristes, la plupart du temps placés en magnifiques rangs d'oignons. Pendant l'ouverture, ils sont couchés et roulent sur le sol, ou lèvent un genou. Doivent-ils pédaler pour faire avancer le bateau? La fête pour le retour de l'équipage de Daland est d'une tristesse insondable, au point qu'on se demande pourquoi ils avaient tellement envie de rentrer chez eux.
Au-dessus de tout ce dispositif, un grand écran sur lequel est diffusée la vidéo réalisée par Kurt D'Haeseleer et Peter Missotten. Le Vaisseau fantôme étant un drame marin, nos deux vidéastes sont allés filmer une étendue d'eau. La mer? Un étang? Une mare? En tout cas rien qui ressemble de près ou de loin à une tempête, et le contraste entre les éléments déchaînés de l'ouverture et les images de doux clapotis projetées sur l'écran est d'un comique certainement involontaire. En deux heures de représentation, nous aurons droit à la projection de trois autres images : une sorte de tas de cailloux, un amas de corps mouvants, et un visage d'homme indéterminé. Finissons cet inventaire avec les costumes : la plupart sont de forme assez lâche, sweat-shirts, vieux paletots et blouses de travail, et de coloris terne, mais tous, sauf le Hollandais, ont les manches beaucoup trop longues. Le plus arrangé est Erik, qui est revêtu d'une très seyante tenue d'égoutier.
Confronté à ce gâchis scénique, c'est Kazuchi Ono qui tient le spectacle à bout de bras, insufflant à son orchestre tout le théâtre qui manque au plateau. Laissant entendre tout un luxe de détails du côté des vents, sa direction est fouillée et soignée, et il prend la partition à bras le corps, déployant son orchestre avec un magnifique sens de la continuité symphonique. Le seul reproche à lui faire est qu'il couvre parfois ses chanteurs en dirigeant un peu trop fort.
La distribution B que nous entendions ce soir est d'un niveau honorable, dominée par la Senta pleine de vigueur de la belge Hélène Bernardy. Le chant est sain et puissant, les aigus ont de l'éclat, la projection est appréciable, et sa ballade est menée avec une belle énergie. Dommage que le timbre soit un peu sec, et le chant investi, mais peu caractérisé. Tómas Tómasson est un Hollandais assez générique, moyennement concerné, doté d'un très beau timbre, mais à l'engorgement assez préoccupant. Le reste du plateau est moins réjouissant : un Daland falot, à la voix grise, et qui n'a pas la moitié des moyens du rôle, un Erik rustique, exemple type de ces ténors braillards et sans style qu'on entend trop souvent dans ce répertoire, une Mary très fatiguée, et un Pilote au timbre charmant et à la projection appréciable, mais qui connaît des problèmes de justesse.
Eléments incontournables du drame, le chœur de la Monnaie fait honneur à son excellente réputation, ses membres en mettent plein les oreilles, tout en restant parfaitement égaux et bien chantants, un régal!
Les téléspectateurs ont dû être déçus par cette pantalonnade, et ce spectacle navrant d'un point de vue scénique prouve qu'il ne suffit pas de rameuter quelques artistes d'avant-garde pour créer l'événement.
Crédit photographique : © Johan Jacobs
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Bruxelles. Théâtre Royal de la Monnaie. 27-XII-2005. Richard Wagner : (1813-1883) : Der Fliegende Holländer, opéra romantique en 3 actes sur un livret du compositeur. Mise en scène : Guy Cassiers ; décors : Peter Missotten ; vidéos : Kurt d’Haeseleer et Peter Missotten ; costumes : Frédéric Denis et Isabelle Lhoas ; lumières : Enrico Bagnoli ; chorégraphie : Adrienne Altenhaus et Fabian Galama. Avec : Tómas Tómasson, Der Holländer ; Hélène Bernardy, Senta ; Alfred Reiter, Daland ; Robert Chafin, Erik ; Jacqueline Van Quaille, Mary ; Jörg Schneider, Der Steuermann. Orchestre symphonique et chœur de la Monnaie (Chef de chœur : Piers Maxim). Direction musicale : Kazushi Ono.