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Antonio Vivaldi (1678-1741). Sophie Roughol. Actes Sud/Classica. 144 pages. Prix indicatif : 15€. ISBN : 2-7427-5652-3 / AS1950. Dépôt légal 2005.
Au disque, comme au livre, Vivaldi continue d’inspirer les éditeurs et les auteurs plus ou moins pertinents. Resmusica. com a salué la Venise de Vivaldi de Patrick Barbier (Grasset 2002, lire la critique de notre consœur Isabelle Perrin).
La biographie de Sophie Roughol tient ses promesses malgré quelques lacunes et réserves, au final bien mineures, on aime son texte, précis, documenté, complet sur la vie, plus superficielle sur l’œuvre. La discographie certes sélective nous a paru un peu légère et s’agissant des opéras, qui est le chantier le plus fascinant de l’heure, davantage de repères, de notules critiques et synthétiques, d’exemples choisis auraient étayé judicieusement le propos. Le Vivaldi de Roland de Candé (collection « Solfège », éditions Seuil, 1967 puis 1994) reste indétronable. Mais nous tenons là un ouvrage convaincant qui dresse un bilan juste de la connaissance actuelle sur le sujet.
La vie du musicien est à la mesure de l’époque et de ses contemporains, tels Haendel ou Rameau. Itinéraire d’un génie musicien, maladif mais hyperactif, touche à tout mais insolemment inspiré : musique instrumentale, oratorio et surtout opéra. On redécouvre aujourd’hui son théâtre lyrique : question de mode et de marketing, profitable aux labels en mal de ventes? Certes pas. Tout au contraire : véritable révélation musicologique dont les prochaines années nous promettent de nouvelles découvertes aussi passionnantes que les Olimpiade, Verità in cimento ou Bajazet récemment publiés en CD. Et Sophie Roughol est bien inspirée de brosser à propos du Vivaldi lyrique, le portrait d’un magicien des planches, soucieux de vraisemblance et de vérité psychologique. A l’instar de Haendel qui lui aussi doit combattre la déferlante des Napolitains, l’abbate (l’abbé : Vivaldi était prêtre), le compositeur vénitien parcourt l’Europe afin d’imposer sa propre conception de l’opéra, non sans susciter jalousies, cabales, scandales et souvent … succès (bien légitimes). Voici le cas exemplaire d’un créateur prolixe qui a démontré autant d’activité et d’épuisante énergie (malgré son « étroitesse de poitrine ») à composer qu’à batailler pour affirmer son talent d’auteur lyrique. Son activité est foisonnante et de fait, les trouvailles du musicien profitent au concepteur dramatique. L’auteur des concertos et des opéras se mêle. Les deux visages jusque-là bien distincts, s’interpénètrent. Le chapitre où l’auteur précise comment d’ouvrages en ouvrages, Vivaldi compose une conception personnelle des caractères, souvent a contrario des modes et des stéréotypes de l’heure, affectionnant les héros libertaires, créant même une typologie propre (d’où ses choix originaux pour des types tels que Montezuma ou Catone). Transfèrerait-il sur la scène et dans la figure de ses héros, sa propre ambition? Son indéfectible indépendance, sa parfaite liberté singulière? C’est là une voie que la recherche future empruntera à coup sûr et de façon décisive : que Vivaldi ait composé moult opéras, nous le savions ; qu’ils soient esthétiquement accomplis, personne n’en doute plus. Comment prétendre le contraire à propos du concepteur de Judith Triomphans, d‘Arsilda, de l’Orlando Furioso, d‘Olimpiade, entre autres? Qu’il ait comme ses contemporains les plus doués, été autant vigilant sur l’imagination musicale que sur la cohérence de sa dramaturgie : voilà une piste habilement amorcée et qui annonce ici d’autres essais passionnants.
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Antonio Vivaldi (1678-1741). Sophie Roughol. Actes Sud/Classica. 144 pages. Prix indicatif : 15€. ISBN : 2-7427-5652-3 / AS1950. Dépôt légal 2005.
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