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Autopsie d’une chorale. Jean Bouchon. Editions Contre-Chant. Mars 2005. ISBN 2-9523887-0-9. 109 pages. 14€.
Voici un petit livre amusant qui fera probablement se tordre de rire ceux qui ont fréquenté de près ou de loin le petit monde des chœurs amateurs.
Le regard est aiguisé, la parole acerbe, visiblement le rédacteur connaît bien cet univers et l’a longtemps fréquenté. Qui a chanté en chorale, peu ou prou, grande ou petite, semi-professionnelle ou amateure, y retrouve avec plaisir tous les membres de la communauté :
« le (rare) ténor : heureuse la chorale qui possède des ténors. Qu’ils soient bons ou mauvais, les ténors sont des êtres très chers. Car les vrais ténors sont aussi rares que les vraies blondes […]. Quoiqu’il en soit, devant la pénurie, baptise-t-on volontiers « ténor » un malheureux baryton qui souffre le martyr dans les aigus, mais qui ne se plaint pas, fier qu’il est d’être un objet précieux ». « Le râleur : dire qu’il est constamment de mauvaise humeur relève du pléonasme. Il n’est jamais content. Il n’aime pas la promiscuité, il n’aime pas le programme, surtout si c’est en étranger, il trouve que l’on apprend trop vite ou trop lentement, il trouve le calendrier trop chargé ou trop maigre, sa pizza est trop crue ou trop cuite, il déteste les voyages car il est malade, il n’aime pas sa voix non plus, et de toute façon la tenue de concert est ridicule et il ne supporte pas la façon de travailler du chef » Ce ne sont que deux exemples parmi d’autres. La description d’une répétition est à hurler de rire, et d’une justesse bien plus précise que la voix de ces malheureux choristes. Tout aussi savoureuse est la caricature du chef de chœur, de la secrétaire d’association…
On retrouve avec plaisir et affection dans ce petit livre des gens qu’on a bien connu, on se remémore telle tournée minable, telle soirée d’après concert dans un petit bistrot… Tout y est, rien ne manque.
Cependant, au fur et à mesure que la lecture se déroule, le rire se fige, et vire au jaune. Car pour une description réussie de ténor, on n’ose pas répéter ce qui est dit de la « femme de couleur » (sic) ou de la « blondasse ». La plume, à force d’ironie, se fait acerbe, le regard, trop acéré, manque de tendresse. A force de vouloir briller, on en devient méchant, on manque d’affection envers ces acteurs indispensables de la vie musicale française. Pire, on vire même dans un discret poujadisme (« Et ce n’est pas une tare, que d’aspirer au beau, quand l’on songe à l’affligeante fadeur des débilités dont les médias nous matraquent à longueur de clips. On ne dira jamais assez, combien, en matière de culture en général et de musique en particulier, le niveau est bas […]. Car dans nos sociétés modernes, le rock, le clip, la BD, le rap, figurent parmi les arts subventionnés. Les choristes seraient-ils un des derniers bastions de résistance à se poser en contrepoids? » « En fait, ce n’est pas que le français manque de goût ; il manque seulement d’éducation. C’est donc par la force des choses et contre son gré qu’il se contente d’un art débile […] il faut avoir engagé une démarche personnelle ou subi le diktat de parents frustrés pour s’apercevoir, in fine, qu’il existe autre chose que la Star Ac et autres inepties diffusées à longueur de soirées sur nos écrans de télévision. » On suppose donc que le choriste moyen n’aime ni le rock, ni la BD, ni les (bons) programmes télévisuels.
Quoiqu’il en soit, ce livre est à offrir à toutes vos connaissances choristes forcenés, chefs de chœur ou bénévoles d’association, en leur précisant de s’amuser au premier degré et de ne surtout pas y réfléchir.
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Autopsie d’une chorale. Jean Bouchon. Editions Contre-Chant. Mars 2005. ISBN 2-9523887-0-9. 109 pages. 14€.
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