Éditos

Grève à Radio-France

Annulation de concerts

Annulation d’un concert à Radio-France, changements au Châtelet. C’est bien connu, dans les médias il est habituel de faire passer les grévistes comme fautifs divers… L’exemple du mouvement social qui a coïncidé avec la visite du comité du CIO en est un flagrant exemple, Paris risquant de rater les Jeux Olympiques de 2012 en raisons de transports en communs ce jour inefficaces.

Quand certains personnels de Radio-France se mettent en grève, bien que la couverture médiatique soit moindre, les effets désirés semblent être les mêmes. Alors que le service de presse de la « Maison Ronde » affiche dans ses communiqués une neutralité de circonstance, sans partis pris mais avec le souci d’informer (annulation du Duca d’Alba de Donizetti ce vendredi 15 avril), le Théâtre du Châtelet (dont les représentations des Bassarides de Hans Werner Henze, en création française, nécessitaient l’Orchestre Philharmonique de Radio-France) verse plutôt dans la polémique.

Dans une missive adressée au public par voie postale, sur Internet (www. chatelet-theatre. com) ou lors du retrait des places aux guichets et datée du 10 avril, Jean-Pierre Brossmann, directeur général du Châtelet, explique les raisons de la déprogrammation de la première représentation des Bassarides qui était prévue au 13 avril dernier (Lire la lettre). En bon représentant du service public (le Théâtre du Châtelet dépend de la Ville de Paris) les autres représentations sont assurées, et une supplémentaire est prévue le 23 avril. L’Orchestre Philharmonique de Radio-France, indisponible en raison du fait de grève, sera remplacé par un groupe de solistes invités dans un arrangement du chef d’orchestre Kazuchi Ono approuvé par Hans Werner Henze. On ne peut évidemment que les féliciter d’avoir pu sauver cette production importante qui a nécessité plusieurs semaines de travail. Mais fallait-il dans ce communiqué public jeter indirectement l’opprobre sur les services de Radio-France en précisant que « le mouvement de grève engagé le 4 avril par certains personnels administratifs et techniques de Radio-France a entraîné l’annulation de la participation de l’Orchestre Philharmonique de Radio-France (dont les musiciens eux-mêmes ne sont pas grévistes) […].  »

On apprend sur ce courrier que l’Orchestre Lamoureux avait été contacté pour un premier remplacement, finalement abandonné. Mais que signifient ces « pressions extérieures » citées par Brossmann qui ont fait échouer cette éventuelle collaboration ? Nul ne le sait, aucune précision n’est apportée, si ce n’est l’impossibilité pour Lamoureux de réunir le nombre suffisant de supplémentaires requis dans l’effectif original pléthorique prévu par Henze. Toutefois la situation plus que précaire de cet orchestre associatif est connue de tous, et les « pressions extérieures » sont plus à comprendre de ce côté. La phrase ouverte de Brossmann à ce sujet entretien le doute… Doute confirmé par la conclusion de cette lettre : « Nous espérons que notre public fidèle approuvera notre position et partagera avec l’ensemble des protagonistes de cette production cet acte de résistance face à une situation qu’à titre personnel, je n’hésite pas à qualifier d’aberrante.  »

Pourquoi prendre le public à partie ? Pourquoi bafouer ainsi le droit de grève (et ses raisons) ? Renoncer à son travail au péril de son salaire et de sa carrière n’est pas un acte anodin, et les grévistes ont parfaitement conscience des conséquences de leur mouvement sur les productions « visibles » de Radio-France. Que monsieur Brossmann ne partage pas les idées de ce mouvement est son droit, puisqu’il met en péril son propre théâtre. Mais de là à parler d’« acte de résistance » et de « situation aberrante » en prenant le public pour témoin… Un texte plus concis parlant de volonté d’assurer coûte que coûte les représentations malgré cette grève que la direction du Théâtre du Châtelet n’approuve pas aurait été un acte d’information. Par cette missive plus que partisane, c’est plutôt de la désinformation.

Les raisons de la grève

Le mouvement de grève des journalistes de Radio-France – qui demandaient l’alignement de leurs salaires sur ceux de France Télévision- en janvier-février 2004 avait fortement perturbé la Maison Ronde. Leur cause ayant été partiellement entendue –l’harmonisation des traitements entre journalistes des deux services publics n’est toujours pas acquise- c’est au tour du personnel technique et administratif d’exiger une renégociation de ces salaires, gelés depuis 1997. Le fait n’est pas nouveau ni imprévisible, les mouvements sociaux de cet hiver ont essentiellement porté sur un pouvoir d’achat en constante baisse.

« Certains personnels ont déjà obtenu les 310 points mensuels (270 euros) que nous demandons. Pourquoi nous, les ouvriers, n’aurions pas la même chose ? Nous aussi, on participe totalement à la vie de l’entreprise. Pourquoi nous ignorer et nous traiter par le mépris, dans les rencontres avec la direction ? », s’indigne un employé chargé de l’acheminement du courrier (in Le Monde daté du 8 avril 2005, propos relayés par Martine Delahaye).

D’un coté les grévistes reprochent à Jean-Paul Cluzel (directeur général de Radio-France) et Renaud Donnedieu de Vabres (ministre de tutelle) leur surdité à leurs revendications. De l’autre, Jean-Paul Cluzel propose une enveloppe de 3, 4 millions d’euros, soit 10% par an de revalorisation pour les plus bas salaires. A cela se rajoute le grand chantier de rénovation des locaux, augmentés cette année de 11 millions d’euros, la somme exigée par les grévistes. Sans parler des difficultés inhérentes aux changements d’une équipe dirigeante.

Pour mieux comprendre :

http : //news. webplanete. net/Greve_Radio_France. htm

http : //www. acrimed. org/article1981. html

http : //www. radiofrance. fr/

(Visited 80 times, 1 visits today)