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Robert Schumann (1810-1856), Davidsbündlertänze op. 6 ; Modeste Moussorgski (1839-1881), Tableaux d’une exposition . Peter Flœr (piano). 1 CD Pan Classics 510 161.
Pan ClassicsPeter Flœr est beau et jeune, et, si l’on en croit la notice biographique, compose, notamment de la musique pop, joue, chante et danse la comédie musicale, pratique la guitare, le trombone, la flûte… Ah oui, il joue également du piano… Et c’est là que ça se gâte.
Il y a deux façons de parler d’un tel disque.
On peut, d’un côté considérer les efforts d’un jeune pianiste en début de carrière pour qui cet enregistrement a dû représenter beaucoup de travail et sur lequel il a sans doute fondé quelque espoir. Mettre en avant la qualité de la notice, de la plume de l’interprète – car il écrit ! -, bien faite et intelligente, mis à part quelques avis personnels assez particuliers – nous y reviendrons –, témoignant d’une bonne compréhension intellectuelle des œuvres. On peut écrire également que les notes y sont. Mais c’est tout !… Et tout le problème est là…
Car, d’un autre côté, un disque est fait pour être écouté. Or, qu’entendons-nous là ? Une version aseptisée des Davidsbündlertänze, à peine phrasée, sans aucune variation de climats d’une pièce à l’autre, dans des tempos si lents que même Kempff a l’air tout excité. Des Tableaux d’une exposition maniéristes, aux tempos constamment bousculés, où les pièces rapides trahissent une certaine prudence devant la difficulté technique.
Peter Flœr a intitulé son essai « Des œuvres… et leur (im)possibilités pianistiques », écrivant « Les gazouillements des trilles du trio dans Ballet des poussins dans leurs coques ne sont que difficilement réalisables. […] Même dans les morceaux plus « conformes » au piano comme Les Tuileries ou Le marché de Limoges, Moussorgski semble vouloir empêcher toute démonstration pianistique […] comme semblent le signaler les indications de tempi assez modérées. »
Voire !… Effectivement, les trilles de Peter Flœr dénotent un manque de délié certain et sonnent lourds et irréguliers dès Gnomus. Effectivement, les déplacements dans Le marché de Limoges et ailleurs paraissent malaisés, les lignes mélodiques sont sans cesse coupées par mille prudences de jeu, les transitions jamais préparées, la sonorité toujours égale et sans profondeur ni puissance. Les raideurs techniques qui émaillent ces interprétations précautionneuses ne peuvent être portées au débit du compositeur ; après tout, certains y arrivent très bien… Ne sont-elles pas les marques, surtout, d’une insuffisante préparation technique ? On pourrait citer mille autres pianistes tout aussi jeunes, voire plus encore, capables aujourd’hui de jouer ces œuvres sans buter devant le premier trait et dans des tempos autrement plus allants. Car graver deux œuvres aussi connues et largement enregistrées compte certains risques, comme celui d’être comparé aux grands pianistes qui vous ont notamment précédés. Et Cortot, Moisewitsch, Horowitz, Kempff, Arrau, Richter, Wild, Brendel et des quantités d’autres n’ont pas attendu Peter Flœr pour démontrer qu’il n’y avait rien d’« impossible » à jouer Schumann ou Moussorgski et, surtout, à faire vivre ces musiques, là où ce jeune pianiste ne dépasse pas le stade scolaire de la mise en place prudente.
Bref, ce disque à peine interprété, qui plus est, est desservi par une prise de son confinée et pauvre en dynamique, est totalement inutile. Pire, il risque fort de desservir la carrière future de ce jeune musicien.
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Robert Schumann (1810-1856), Davidsbündlertänze op. 6 ; Modeste Moussorgski (1839-1881), Tableaux d’une exposition . Peter Flœr (piano). 1 CD Pan Classics 510 161.
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