Otello de Verdi ouvre les Chorégies 2003 sous la protection des intermittents du spectacle
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Orange. Théâtre Antique. 12.VII.2003. Giuseppe Verdi (1813-1901), Otello. Tamar Iveri (Desdemona), Nona Javakhidze (Emilia), Vladimir Galouzine (Otello), Jean-Philippe Lafont (Iago), Yann Beuron (Cassio), Luigi Roni (Ludovico), etc. Chœurs du Théâtre du Capitole de Toulouse, du Grand Théâtre de Tours et de l’Opéra-Théâtre d’Avignon et des Pays de Vaucluse. Ensemble Vocal des Chorégies d’Orange. Maîtrise de l’Opéra-Théâtre d’Avignon et des Pays de Vaucluse. Ensemble Instrumental des Chorégies d’Orange. Orchestre National de France. Direction : Evelino Pidò. Mise en scène et scénographie : Nicolas Joel. Costumes : Franca Squarciapino. Lumières : Vinicio Cheli.
Fallait-il ou non sauver les Chorégies d'Orange 2003, manifestation lyrique estivale la plus populaire de France, en donnant Otello de Verdi à l'heure où renonçaient les illustres voisins, les Festivals d'Aix-en-Provence et d'Avignon ?…
Annuler ce festival autofinancé à 80 %, c'était le vouer à une disparition certaine, ce qu'attend depuis huit ans la municipalité Front national d'Orange. Conscients du danger, et comme ils l'ont précisé avant le début de la représentation, les intermittents ont choisi la pérennisation en assurant le déroulement normal du spectacle. Il est vrai que, depuis l'arrivée à Orange d'une majorité frontiste en 1995, les Chorégies sont l'objet de conflits continuels qui placent souvent à l'arrière plan la dimension artistique de ce grand rendez-vous d'été. Cette situation montre combien ce festival est, en fait, un colosse aux pieds d'argile. Fort peu subventionné, il ne vit pour l'essentiel que sur ses recettes propres, alors qu'il est considéré à juste titre comme une tête de pont culturelle contre l'extrême droite, ce qu'a compris la CGT, syndicat qui, depuis le 27 juin, s'est engagé à garantir la continuité des Chorégies.
Incompréhension du public
Le public, venu aussi nombreux que de coutume (plus de 16.400 places louées pour les deux représentations d'Otello), a pourtant accueilli les délégués des intermittents sous des bordées d'injures, protestant bruyamment lorsque, quelques minutes avant le premier accord, une voix demanda un quart d'heure d'attente avant de proclamer une minute de silence. Artistes et techniciens se levèrent alors diligemment, ainsi que les musiciens de l'Orchestre National de France. Autre « surprise », la présence d'un intermittent en caleçon au milieu du dernier chœur du finale du troisième acte.
La révélation Tamar Iveri
Mais ces incidents finalement sans réelle conséquence si l'on considère ce qui s'est passé ailleurs, n'ont causé aucun préjudice à la production d'Otello proposée par Evelino Pido et Nicolas Joël, le spectacle se déroulant dans d'excellentes conditions. Habitué à l'immense scène du Théâtre Antique comme invité privilégié de Raymond Duffaut, directeur des Chorégies, Nicolas Joël a divisé l'espace en trois plateaux soutenus par autant de grues de docks, une scène centrale encadrée de deux satellites délimitant actions principales et secondaires. Cette scénographie situe remarquablement le drame dans l'enceinte du port de la Chypre de la République de Venise. Difficile néanmoins de juger d'une direction d'acteur dans ce cadre trop grand mais où l'on entend à la perfection. Ce qui permet de saisir combien Jean-Philippe Lafont, excessivement sonore, en fait des tonnes, transformant le venimeux Iago en un bouffon façon Falstaff, alors que la magnifique Tamar Iveri, voix souple, lumineuse, pleine et égale sur toute la largeur de son registre, incarne une Desdemona rayonnante d'amour et de foi. Face à la jeune soprano géorgienne, un Vladimir Galouzine décevant, bien qu'il se soit bonifié en cours de représentation. Voix étranglée et souvent trop grave, le ténor russe s'est montré peu en forme, ce qui présume mal de son Otello de l'Opéra de Paris pour la saison prochaine. Comme de coutume à Orange, le reste de la distribution est très cohérent, particulièrement l'excellent Cassio de Yann Beuron et le Ludovico de Luigi Roni. L'Orchestre National de France a brillé par la variété de ses couleurs et la souplesse de ses nuances, cordes mœlleuses, bois de braise, cuivres étincelants, dirigé avec vitalité et assurance par Evelino Pidò, au risque parfois de sérieux décalages.
Crédit photographique : © DR
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Orange. Théâtre Antique. 12.VII.2003. Giuseppe Verdi (1813-1901), Otello. Tamar Iveri (Desdemona), Nona Javakhidze (Emilia), Vladimir Galouzine (Otello), Jean-Philippe Lafont (Iago), Yann Beuron (Cassio), Luigi Roni (Ludovico), etc. Chœurs du Théâtre du Capitole de Toulouse, du Grand Théâtre de Tours et de l’Opéra-Théâtre d’Avignon et des Pays de Vaucluse. Ensemble Vocal des Chorégies d’Orange. Maîtrise de l’Opéra-Théâtre d’Avignon et des Pays de Vaucluse. Ensemble Instrumental des Chorégies d’Orange. Orchestre National de France. Direction : Evelino Pidò. Mise en scène et scénographie : Nicolas Joel. Costumes : Franca Squarciapino. Lumières : Vinicio Cheli.