Juliane Banse / Ingeborg Danz / Christoph Prégardien / Olaf Bär, la bande des quatre (plus deux).
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Strasbourg. Opéra du Rhin le 23 Janvier 2003. Brahms : Liebeslieder Waltzer. Schubert : An die Sonne, Gebet, Des Tages Weihe. Michael Gees : Das göttliche d’après Gœthe. Schumann : Spanische Liebeslieder. Juliane Banse, soprano. Ingeborg Danz, Mezzo-soprano. Christoph Pregardien, Ténor. Olaf Bär, Baryton. Michael Gees et Wolfram Rieger, piano.
Affiche de prestige à l'opéra du Rhin de Strasbourg, quatre chanteurs de haut rang accompagnés par des maîtres du clavier parfois envahissants ont exploré avec délice les méandres de Brahms, Schubert et Schumann.
Qu'il est loin le temps de Gérald Moore et de sa géniale retenue ! Lui, et ceux de son école, se rappelaient un principe essentiel du lied : c'est la voix qui joue le premier rôle, le piano pose l'ambiance, commente l'action, suggère et fait allusion, mais ne prend jamais la parole plus haut que son maître. Peu de pianistes accompagnateurs sont aujourd'hui capables de cette humilité : il leur faut briller de tous leurs feux comme s'il fallait prouver leur vaillance et faire état de leur valeur non reconnues jusque là. Nos deux virtuoses du clavier – Michael Gees et Wolfram Rieger – n'ont pas fait exception. Chacun pris isolément pouvait se souvenir de quelque leçon de retenue, mais en duo ils devenaient redoutables de mimiques et de jeu quasi scénique, sans oublier une tendance finalement agaçante à rendre les forte encore plus forts, au risque de couvrir les voix.
D'autant plus que le quatuor réuni pour la circonstance – avec Christoph Prégardien, Olaf Bär, Juliane Banse et Ingeborg Danz – travaillait volontiers le registre de la subtilité et de la discrétion. Leur interprétation, sobre et bien sentie des « Liebeslieder Walzer » de Brahms, en était une illustration parfaite. Chacun connaît la teneur paillarde, et passablement en dessous de la ceinture de ces pages par ailleurs poétique de l'auteur du « Requiem allemand », dont les notes flirtent ici bien plus avec le spiritueux que le spirituel. Ne cédant pas à la facilité, qui aurait consisté à « jouer » ces lieder à grands renforts d'allusions scéniques et de regards concupiscents, notre quatuor a préféré s'en tenir au texte. Le texte, précisément, et en l'occurrence celui de Gœthe dans son grand poème panthéiste sur le monde, a poussé le pianiste Michael Gees à oser le mettre en musique dans un style hymnique proche du dernier Richard Strauss. Si l'œuvre regarde indéniablement vers le passé, son style, solide et sans faille, fut bien rendu par les interprètes d'un engagement sans faille.
Trois pièces de Schubert allaient constituer le sommet du concert. Peut-on faire meilleur compliment à un musicien que de dire qu'il s'est effacé devant la musique ? Jamais l'écriture de Schubert, son osmose innée avec le verbe n'auront été à ce point valorisées que par ces six musiciens subitement pleinement réunis dans une même extase pudique qui nous laissait pantois et émus. Murmures délicieux et attaques idéales se succédaient dans un tourbillon de sonorités d'une justesse surprenante.
Les « Spanische Liebeslieder » de Schumann plus difficiles d'accès, mais merveilleusement rendus nous ramenaient sur terre et un « bis » de Brahms où Olaf Bär se permit une fausse entrée rappelait à tous que l'humain est perfectible.
De la musique de chambre au sens plein et noble du terme, dans le cadre idéal de l'opéra du Rhin.
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Strasbourg. Opéra du Rhin le 23 Janvier 2003. Brahms : Liebeslieder Waltzer. Schubert : An die Sonne, Gebet, Des Tages Weihe. Michael Gees : Das göttliche d’après Gœthe. Schumann : Spanische Liebeslieder. Juliane Banse, soprano. Ingeborg Danz, Mezzo-soprano. Christoph Pregardien, Ténor. Olaf Bär, Baryton. Michael Gees et Wolfram Rieger, piano.